Légende du puits fabuleux

 


Voici narrée ici pour vous la très belle et très édifiante légende de Raimbaud II, Comte d'Orange, telle qu'elle est, encore de nos jours, transmise dans les veillées.

Nous sommes en l'An de Grâce 1095, par un de ces jours d'été torrides que seule génère la Provence intérieure, Raimbaud II, Seigneur des lieux, parcourt ses terres. Croisé, il doit quitter bientôt la doulce terre de France pour s'en aller en terre sarrazine.
Homme juste, aimé de ses sujets, il a reçu moult témoignages d'encouragement.
Chacun y est allé, selon ses moyens, de son obole : qui a donné une poule, qui un sac d'orge ou une galette pour aider au départ du Seigneur,
fils de Raimbaud Ier et de la très belle et si douce Rosamée, grand'tante de la reine Blanche, (mère du futur Roi saint Louis) morte en pleine jeunesse.
D'elle, Raimbaud II a hérité des yeux d'un bleu magnifique de lapis-lazuli. Sa prestance, héritée de son pére et son épaisse chevelure brune flottant  à l'allure de sa monture. Il parcours paisiblement le pays, perché sur son Aldran, son élégant destrier.
Épuisés par leur longue course sous le soleil, assoiffés, Raimbaud II et Aldran, son fougueux destrier noir, parviennent au lieu dit .. Clos de l'Escarrat ..

Devant l'humble chaumière où elle vit avec ses parents, Valère et Jeanne, et ses deux jeunes frères, Clément et Jerphanion,
Thibaude voit le cavalier mettre pied à terre, et reconnaît en lui son Seigneur.
Vivement, elle pose la corbeille de linge qu'elle ravaudait, défroisse son tablier immaculé sur lequel s'accroche le soleil et gracieuse, se hâte de se présenter au noble visiteur, fait la révérence avant de s'enquérir de ce en quoi elle peut être utile.
Raimbaud II la prie de tirer du puits un seau d'eau fraîche, afin d'étancher sa soif et d'abreuver sa monture.

La jeune fille a tôt fait de le satisfaire.
Le cavalier tient à la remercier, et lui don de quelques pièces qu'il extrait de sa bourse et les lui remet.
Il s'apprête à remonter sur son fidèle étalon, la jeune fille lève son regard vers lui et lui explique que ce puits à l'eau si pure est "un puits à souhaits" et que tous ceux qui, s'y étant désaltérés, y jettent quelques pièces, voient leurs vœux exaucés.

Avant qu'il ait pu ébaucher le moindre geste pour l'en empêcher, la jeune fille laisse tomber dans l'eau toutes les pièces contenues dans ses mains.
Raimbaud II, surpris, lui demande alors pourquoi elle s'est ainsi défaite d'un argent qui aurait, de toute évidence, pu être bien utile à sa famille..
 
- Mon Seigneur, nul n'ignore ici votre départ pour la Croisade.
Je viens de faire dans l'eau du puits le vœu de vous y voir réussir, avec vos compagnons d'armes, la prise d'Antioche et Jérusalem, avant de nous revenir sauf et glorieux.

Raimbaud II, aussi interloqué qu'intrigué, inclina la tête, puis reprit résolument sa route...
Après un périlleux voyage au visage de pèlerinage, le Comte d'Orange regagna triomphalement ses propriétés.

Un matin de l'été 1098, il monta à cheval et partit sans but défini, pour se retrouver près du "Clos de l'Escarrat".
Avançant doucement vers la maisonnette, il aperçut Thibaude, penchée sur un ouvrage de broderie, entrelaçant patiemment plumes et laines filées.

Sentant tout à coup un regard posé sur elle, Thibaude releva la tête et son sourire s'épanouit.
Ce sourire qui, dans l'horreur des combats, avait accompagné le valeureux chevalier, mois après mois.
Raimbaud II hissa prestement la jeune fille devant lui sur le dos d'Aldran, et tous trois prirent le chemin que leur réservait la destinée. La passion les unit définitivement jusque dans la mort.

Ils s'aimèrent d'une passion dévorante, ils eurent de nombreux enfants, fruits de cet immense amour et expirèrent dans les bras l'un de l'autre, le même jour terrassés par la terrible épidémie de fièvre qui décima la région.
Même l'eau du puits n'avait pu les sauver. Mais leurs âmes ardentes sont encore présentes au bord de la margelle du puits du " Clos de l'Escarrat ".
Depuis lors, l'eau du puits du Clos de l'Escarrat est restée fameuse par tout le Comté d'Orange et au-delà. ..


La légende dit que leurs âmes ardentes sont encore présentes au bord de la margelle du puits du " Clos de l'Escarrat ".


On raconte qu'en 1678, en curant son puits, tari à la suite d'une exceptionnelle sècheresse, le propriétaire des lieux, le fermier Abel Gondrand trouva une telle quantité de sous d'or, un vrai trésor, qu'il put envisager la construction une belle bastide devenue " Le Mas du Clos de l'Escarrat".

 

* Source: Contes et légendes de Provence

 

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16/05/2012
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